14 novembre 2023
Le Style Sapin, un Art Nouveau à La Chaux-de-Fonds,
qui a vu naître le talent de Le Corbusier
Conférence de Paul Soyeur aux Halles Saint-Géry salle des voûtes
L’année “Bruxelles, capitale de l’Art Nouveau” ne pouvait laisser la Suisse indifférente, puisque s’est développé, à La Chaux-de-Fonds, un Style Sapin.
Comme partout en Europe, explique Paul Soyeur qui partage son expérience de président des Amis du Musée Horta, ce style nouveau apparaît dans une période d’expansion économique. Ce qui a été le cas à La Chaux-de-Fonds grâce à l’industrie horlogère.
La population triple entre 1850 et 1910, ce qui stimule la demande en nouveaux logements, tandis qu’apparaissent différentes écoles, dont l’école d’arts appliqués à l’industrie... Elle va assurer la promotion d’un art nouveau adapté à la tradition suisse.
Le personnage initiateur y a été Charles L’Eplattenier, formé à Budapest et à Paris, qui, quand il devient professeur puis directeur de l’école, étend les cours - essentiellement axés sur l’horlogerie jusque là - aux arts décoratifs et à l’architecture.
Par une collection d’objets Art nouveau français ou allemand, il fait partager à ses étudiants ce grand mouvement qui se diffuse en Europe sous des appellations diverses d’Art Nouveau à Jugendstil.
Il a la bonne idée de créer à l’Ecole d’Art des ateliers pour permettre aux élèves de s’exprimer dans des projets réels. Ce qui leur permet de participer à des concours (tel l’envoi de 108 projets de boîtiers de montres, récompensés à l’Exposition Universelle de Milan en 1906), mais surtout de s’impliquer dans des projets dont deux réalisations qui ont fait date : la Villa Fallet, pour un graveur et bijoutier, et le Crématorium, pour la ville de La Chaux-de-Fonds.
Le nouveau style de ces deux bâtiments - qui a des connivences avec l’Heimatstil, lequel se réfère à la Suisse pittoresque et en entretient la nostalgie - fait largement usage d’éléments inspirés par les conifères. Le plus flagrant, ce sont les sgraffites de la façade de la Villa Fallet, mais ils ne sont pas les seuls. Il faut regarder la rive du toit, la balustrade, les petits bois des fenêtres : les références aux sapins sont nombreuses. Même la pose particulière des tuiles évoque une vallée boisée de sapins.
Les archivoltes du Crématorium sont décorées de pommes de pin et autres symboles de la nature helvétique.
A côté de ces monuments prestigieux, il faut ajouter les balcons de nombreuses maisons dont les ferronneries et les vitraux de joues sont assez typiques de La-Chaux-de-Fonds, ainsi que les innombrables ornementations d’intérieurs que l’on découvre en poussant une porte : peintures et décorations murales, carreaux de céramiques, vitraux.
Élève de l’Ecole d’Art, Le Corbusier y a pour la première fois révélé son talent lors de la conception, en collaboration avec l’architecte René Chapallaz, de la Villa Fallet.
Il imprime sa patte en imaginant de nouveaux agencements des volumes : l’entrée est placée perpendiculairement à l’axe de composition, le hall central assure une distribution très ouverte des pièces sur les deux étages et crée un volume libre sur les deux niveaux. Le début de la carrière que l’on sait.
Après la Villa Turque (1916) pour laquelle il avait dépassé le budget prévu et qui ne plaisait pas à tout le monde, il se rend à Paris.
En 1920, pour se distinguer de son cousin Pierre Jeanneret, il y change son nom de Charles-Édouard Jeanneret et adopte le pseudonyme de «Le Corbusier», lequel s'inspire du nom d'une trisaïeule maternelle, son arrière-grand-mère Caroline Le Corbésier, d'origine belge.
L'orateur
La salle des voûtes aux Halles St-Géry
La présentation
Autoportrait de Charles L'Eplattenier
La Villa Fallet
Détail de la grille de la Villa Fallet
Vue extérieure du Crématorium
Le Style Sapin...
...exprimé dans l’archivolte au Crématorium
Joues de balcon avec vitraux
Un motif très typique dans un couloir de maison
La Villa Turque qui fera partir Le Corbusier à Paris